Discours de Mme Geneviève Darrieussecq au séminaire du Réseau social européen (European social network) sur les partenariats pour l'inclusion sociale
Bordeau, le 26 septembre 2022
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Discours de Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des Personnes handicapées lors du séminaire du Réseau social européen (European social network) sur les partenariats pour l'inclusion sociale, le 26 septembre 2022.
Seul le prononcé fait foi.
Monsieur le Président [Christian FILLET],
Monsieur le Président du Conseil départemental, cher Jean-Luc,
Mesdames, messieurs,
Je voudrais remercier chaleureusement le Réseau Social Européen de nous réunir aujourd’hui pour ce séminaire. Je suis très heureuse d’être présente à vos côtés.
Merci également au président du conseil départemental de Gironde de nous accueillir dans ses locaux.
Je tiens d’ailleurs à souligner combien notre présence en ces lieux fait particulièrement sens. Elle rend manifeste la nécessaire articulation des différents échelons territoriaux. C’est le signe d’une conviction forte : depuis l’Europe jusqu’aux territoires, en passant par les États, les régions et les départements, on ne peut déployer une politique sociale efficace qu’en faisant travailler les différents acteurs ensemble, au service de nos concitoyens et au plus près de leurs besoins. Voilà au fond le message que nous devons avoir aujourd’hui, chacun à notre niveau.
Et c’est précisément le message que porte le RSE, dans sa manière de réunir les différentes instances qui déploient les politiques sociales européennes, en association avec les acteurs du monde de la recherche et de l’Université. Les échanges entre partenaires européens, pour partager entre nous les solutions qui fonctionnent, sont infiniment précieux. C’est encore plus vrai lorsqu’il s’agit de discuter à un niveau technique. C’est comme cela que la construction européenne peut produire des résultats très concrets qui bénéficient à l’ensemble des citoyens de notre Union.
Et ce faisant, nous défendons aussi une double idée qui est m’est personnellement très chère et qui est aussi défendue par le Gouvernement et le Président de la République.
D’abord l’idée que l’expertise et la connaissance sont des outils de premier ordre qui permettent de bâtir solidement nos politiques publiques. Nos concitoyens nous expriment quotidiennement une exigence d’efficacité dans la conduite de notre politique sociale. Cette efficacité ne peut se permettre de faire l’économie de la réflexion, de la comparaison et de l’analyse, éclairées par tous les outils à notre disposition.
Mais la deuxième idée, tout aussi importante, c’est que toute expertise doit s’éprouver sur le terrain, au plus près de l’expérience vécue par nos concitoyens, dans leur vie de tous les jours. C’est là aussi une idée que le Réseau social européen défend avec une vigueur que je tiens à saluer.
Le séminaire qui nous réunit aujourd’hui pour deux jours sera donc l’occasion de mettre en perspective les expériences de différents organismes publics européens en matière d’inclusion des populations les plus vulnérables. Il doit permettre l’échange de bonnes pratiques, afin de perfectionner nos processus et d’innover pour mieux protéger nos concitoyens les plus fragiles.
Les échanges qui vont se poursuivre durant ces deux jours doivent s’orienter plus précisément sur l’intégration et la combinaison d’une logique de prestation avec une logique d’accompagnement par les services sociaux. Pour le Gouvernement français, c’est un programme qui est particulièrement pertinent puisqu’il entre en résonance avec les principaux défis que nous entendons relever dans le domaine de l’accès aux droits.
Je pense en tout premier lieu au non-recours aux droits, qui est, il faut bien le dire, plus qu’une aberration : un véritable scandale.
Un scandale qui touche, qui plus est, l’ensemble des pays européens, quelles que soient les spécificités de leurs systèmes sociaux. Si je prends le cas de la République tchèque, par exemple (j’étais à Prague la semaine dernière, comme certains d’envers vous), 40 % des ménages en 2017 ne recevaient pas les allocations familiales auxquelles ils ont droit. En France, le taux de non-recours pour la couverture maladie universelle complémentaire se situe entre 32% et 44%, selon des chiffres de 2018. À chaque fois, nous faisons face à des ordres de grandeur particulièrement impressionnants : on ne parle pas d’une infime minorité, mais du tiers, de la moitié, et même parfois plus, des populations qui ne bénéficient pas des droits qui sont les leurs.
Cette problématique du non-recours, tous les pays d’Europe doivent donc la traiter. C’est une question de politique nationale, mais c’est aussi une question qui doit se régler à l’échelle européenne, dans un contexte où les populations circulent et où l’harmonisation de nos systèmes de solidarité est une exigence majeure.
Lors de la dernière campagne, le Président de la République française a fait de la question du non-recours une de ses priorités. La Première ministre a ainsi confié à Jean-Christophe Combe la charge de construire un « ministère des solidarités concrètes ». La mise en place de la solidarité à la source doit être une réponse à cette situation.
Cette solidarité à la source est bien sûr un défi technique à relever. Mais je sais que nous pouvons compter sur les différents organismes de prestations sociales, que je salue, dans la mise en œuvre de cette avancée essentielle pour la lutte contre la précarité, en lien étroit avec les collectivités territoriales.
Par ailleurs, il faut aussi s’attaquer en même temps au large front de la simplification des démarches, ainsi qu’à celui de l’accessibilité des services publics. Presque la moitié des non-recours aux droits s’expliquent par le manque d’information (ou d’accès à l’information). Pour un autre quart de ces non-recours, c’est la trop grande complexité et les délais des démarches qui sont en cause.
La simplification doit donc être une priorité, car simplifier les démarches c’est simplifier la vie des gens.
Cela vaut d’abord et avant tout pour les usagers et les bénéficiaires, les populations les plus vulnérables, celles qui doivent précisément faire l’objet d’une attention toute particulière de la part de nos systèmes de solidarité.
Mais cela vaut aussi pour l’ensemble des personnes qui travaillent dans ces services. J’ai la conviction que les femmes et les hommes qui font vivre au quotidien, par leur travail, nos services de solidarité, préféreront toujours s’occuper de quelqu’un plutôt que de traiter un numéro en haut d’un dossier. Les libérer de contraintes inutiles ou de procédures trop complexes, c’est aussi leur donner du temps pour mieux prendre soin des personnes, en respectant mieux les attentes et les spécificités de chaque public.
Cette efficacité de nos systèmes de solidarité, nous la devons à nos concitoyens, parce que la solidarité est une composante essentielle de ce qui unit un demi-milliard d’Européens, par-delà les frontières et par-delà les différences.
La solidarité fait partie de l’ADN de l’Europe. Elle est aussi au cœur de la promesse républicaine française. C’est pour cela que nous devons être à la hauteur des défis qui nous font face.
Je vous remercie.